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15-03-2024 - La gestion des biens donnés et la société simple.
Il est fréquent que le dirigeant d’une P.M.E. qui donne les actions de sa société à ses enfants souhaite néanmoins conserver le contrôle de celle-ci.

Plusieurs possibilités s’offrent à lui.

Dans la présente contribution, nous analyserons les avantages et les inconvénients de recourir à une société simple en tant qu’outil de contrôle.

Dans nos prochains articles, nous étudierons d’autres moyens tels que le mandat de gestion, l’usufruit et la clause de gestion.

Quel est l’intérêt de créer une société simple ?

  1. Créer volontairement un patrimoine indivis, sans incidence fiscale si ce patrimoine est mobilier ; l’instrument est donc particulièrement adapté pour la mise en commun d’un portefeuille d’actions de sociétés.
  2. Organiser la gestion de ce patrimoine indivis en la maintenant entre les mains du ou des fondateur(s) ; ces derniers conserveront la gestion et pourront même prévoir que la jouissance des biens entrés en indivision restera de la compétence exclusive d’un seul gérant fondateur.
  3. Organiser ensuite des transmissions par voie de donation de la presque totalité des quotités indivises aux successeurs qui deviendront des associés.
  4. Assurer la répartition du patrimoine, en cas de liquidation de la société, sans coût fiscal de mutation si le patrimoine est mobilier (actions de sociétés) et à un coût fiscal réduit (1 % de la valeur vénale des biens) si, dans le patrimoine indivis, il existe un ou plusieurs immeubles acquis par l’indivision après la constitution de celle-ci.
Quels en sont les avantages ?

  1. Il ne faut pas de capital minimum ;
  2. Pas besoin d’acte notarié, sauf en cas d’apports d’immeubles ;
  3. Les statuts ne doivent pas être publiés (discrétion) ;
  4. L’absence de personnalité juridique implique peu de formalités et de coûts de constitution ;
  5. Les parties peuvent conclure des accords très souples, notamment en ce qui concerne la distribution des bénéfices et le contrôle. C’est notamment grâce à cette grande liberté qu’on voit souvent la société simple émerger dans la planification patrimoniale familiale. Les parents transfèrent ainsi un patrimoine à leurs enfants par l’intermédiaire de la société simple, sans devoir immédiatement renoncer à son contrôle et aux revenus de celle-ci ;
  6. Il s’agit d’une société « fermée » de sorte qu’un associé ne peut céder ses actions qu’à la double condition que les statuts de la société l’y autorisent et que tous ses coassociés y consentent ;
  7. La société simple est, en outre, facile à dissoudre ;
  8. La société simple ne doit pas payer de cotisations fiscales car elle est fiscalement transparente : elle n’est pas soumise à l’impôt sur les sociétés. Les revenus de la société civile sont directement imposés dans le chef des associés au titre de revenus mobiliers ;
  9. Pas de saisie directe des créanciers personnels des fondateurs sur le patrimoine de la société ;
  10. Priorité aux créanciers de la société sur le patrimoine de la société.
Quels en sont les inconvénients ?

  1. Il faut tenir une comptabilité en plus des comptabilités des sociétés patrimoniales concernées et
  2. un registre des associés ;
  3. Les associés sont indéfiniment et solidairement responsables ;
  4. Obligation d’inscription auprès de la B.C.E. ;
  5. Déclaration au registre UBO ;

Assurément, des avoirs mobiliers, tels des actions de sociétés ou encore des avoirs bancaires, peuvent faire l’objet d’un apport au sein d’une société simple.

La société simple en pratique :


Le dirigeant constitue avec ses enfants majeurs, par acte sous seing privé, une société de droit commun dans laquelle il apporte les actions de ses sociétés patrimoniales et/ou d’exploitation, les enfants apportant chacun une somme d’argent (éventuellement donnée préalablement par le père).

En contrepartie de leurs apports, le père reçoit 998 parts et ses enfants 1 part chacun (représentatives des quotités indivises).

Le père est nommé gérant à vie et, en cas de prédécès, un tiers ou ses deux enfants ou encore un de ses enfants, reprendront la fonction.

Concomitamment, le père donne 898 parts à ses enfants (il conserve un peu moins de 10 % des parts de la société).

Dans l’acte, il faut également prévoir :

  1. l’interdiction pour les enfants d’apporter les parts données à une communauté de biens résultant de leur mariage ou à une indivision née d’un contrat de vie commune ;
  2. une clause de retour conventionnel pour le cas du prédécès des enfants.

Le décès du père entraînera en principe la dissolution de la société simple, mais il est possible de déroger à cette règle dans les statuts et de prévoir une clause de continuation avec les associés survivants.

Qu’en est-il du régime fiscal ?

Dans la mesure où la société simple n’a pas de personnalité juridique, les opérations portant sur les actions des sociétés patrimoniales apportées à la société simple sont censées être réalisées directement par ses associés.

Sur le plan fiscal, cela signifie que seuls les associés seront taxés, pas la société simple.

Si l’une ou plusieurs des sociétés patrimoniales distribuent des dividendes => les associés recevant ces dividendes devront payer un précompte mobilier de 30 % ou un précompte mobilier réduit à 20 ou 15 % après une période d’attente de 2 ou 3 ans.

Si l’une des sociétés verse des bénéfices aux associés => ceux-ci devront intégrer ces bénéfices dans leur déclaration fiscale.

Dans l’hypothèse d’une cession d’actions de la société simple avec plus-value, la valeur de réalisation des actions et la plus-value éventuelle seront versées par la société simple aux associés. La plus-value sera, en principe, exonérée d’impôts.

Séduisant sous l’angle de la mise en place d’une technique de contrôle des sociétés dont les actions sont données aux enfants, le recours à la société simple reste néanmoins problématique lors du décès du dirigeant. En effet, ses héritiers se retrouvent en indivision au niveau des actions de la société. Or, dans un contexte tendu entre héritiers, cela risque de poser problème. Par ailleurs, la valeur des 10 % que le père a conservée entrera dans le calcul des droits de succession que les enfants devront acquitter.

D’autres techniques nous paraissent plus intéressantes. Elles seront évoquées dans nos prochains articles…